Le secteur du funéraire se réinvente après 30 ans de privatisation

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Le secteur funéraire est certainement l’un des secteurs commerciaux les plus anciens du monde. Depuis la nuit des temps, les pompes funèbres proposent leurs services aux familles endeuillées. Depuis une trentaine d’années pourtant, de nombreuses évolutions ont bouleversé le milieu funéraire, des évolutions permettant de s’adapter aux nouveaux besoins des familles.

L’histoire des pompes funèbres, de la privatisation à l’ouverture à la concurrence

Les humains inhument leurs proches depuis plus de 80 000 ans. Les Égyptiens sont toutefois les précurseurs des pompes funèbres puisqu’ils sont à l’origine de la momification et des sarcophages.

Par la suite, ce sont les églises qui ont pris en charge l’organisation des obsèques. Cela signifie donc que tous n’avaient pas le droit à des obsèques dignes de ce nom. C’était notamment le cas des non-catholiques, des femmes divorcées, des homosexuels ou des personnes s’étant elles-mêmes données la mort. Les premiers cimetières ont ainsi fait leur apparition au Moyen-Âge. Placés souvent au centre du village, les cimetières étaient des lieux de vie pour les habitants.

En 1889, la crémation est légalisée pour se développement réellement à partir de 1963.

En 1905, les idées républicaines ont fait en sorte que les pompes funèbres deviennent un service public sous tutelle de la commune. Cette évolution permet ainsi à n’importe qui de disposer d’une cérémonie lors de ses obsèques.

Depuis 1993, la loi Sueur a permis d’ouvrir le marché des pompes funèbres à la concurrence tout en imposant également plus de transparence. Concrètement, cette loi a permis aux familles de choisir librement leur opérateur funéraire ce qui a ainsi mis fin au monopole communal des pompes funèbres.

Aujourd’hui, des nouveautés émergent dans le secteur comme notamment les pompes funèbres en ligne et les coopératives.

Sommaire de l'article

Le marché des obsèques, un business très juteux !

La loi d’ouverture à la concurrence de 1993 a favorisé le développement de nouvelles PME dans le secteur. D’ailleurs, le marché du funéraire est passé d’un chiffre d’affaires de 1,28 milliard d’euros en 2000 à 2,25 milliards d’euros en 2015 pour environ 600 000 cérémonies d’obsèques organisées tous les ans.

Toutefois, le secteur est toujours marqué par un mouvement de concentration des quelques 3 600 entreprises recensées en 2015. Le leader historique, OGF, assure d’ailleurs environ 20% des obsèques organisées en France. La moitié du chiffre d’affaires du marché est réalisé par une douzaine de réseaux d’entreprises. Les régies publiques, quant à elles, qui avaient 20% de part de marché en 1990 n’en disposent plus que de 7% à l’heure actuelle. Seules certaines grandes villes comme Paris ou Lyon conservent une offre publique conséquente.

Cependant, l’ouverture du marché funéraire à la concurrence de 1993 n’a pas eu l’effet escompté sur les prix pratiqués auprès de la clientèle.

L’indice des prix des prestations funéraires a connu une hausse deux fois plus rapide que celui de l’inflation. Actuellement, enterrer un défunt coûte entre 3 350 et 3 600 euros en moyenne. Pour une inhumation, il faut compter entre 1 347 et 6 449 euros. Pour une crémation, le tarif peut atteindre jusqu’à 6 500 euros selon les prestations choisies et le lieu d’habitation du défunt. En 30 ans, l’offre de prestations s’est considérablement élargie. Par exemple, aujourd’hui, 3 000 sites funéraires proposent un accueil en chambre funéraire contre seulement 300 en 1993. De même, le nombre de crématoriums a été multiplié par 4 sur la même période.

En outre, les banques, les assurances et les mutuelles proposent désormais à leurs clients d’assurer le financement de leurs obsèques par le biais de contrats de prévoyance obsèques notamment. En 2017, 4,5 millions de Français avaient souscrit à une telle démarche.

L’opacité des tarifs, le point noir qui perdure dans le secteur funéraire

Malheureusement, l’ouverture à la concurrence n’aura pas non plus favoriser la transparence des prix pratiqués dans la profession.

Pourtant, il s’agissait bien de l’un des objectifs fixés par la loi de 1993, des objectifs seulement partiellement atteints.

En cause, le délai dont dispose les familles endeuillées pour organiser les obsèques de leur proche (entre 1 et 6 jours ouvrables suivant le décès). Un délai court pour des démarches qui demeurent complexes. Ajoutés à cela, une évolution tarifaire défavorable aux familles, des prestations supplémentaires parfois sous-entendues obligatoires, des prix pas toujours affichés et des options proposées de prix et de nature très variables. De plus, les contrats de prévoyance obsèques sont fortement pointées du doigt car les garanties apportées par ces contrats sont clairement jugées insuffisantes.

Certains départements français ne peuvent opter pour la crémation. Choisi par de plus en plus de Français, ce service public est pourtant inexistant dans 11 départements de France (Haute-Marne, Lot, Guyane, etc.). Une situation qui engendre des surcoûts pour les familles puisqu’il est en général moins cher d’incinérer un défunt que de l’inhumer.

D’autres prestations sont pointées du doigt pour leur opacité, des offres souvent faussement « low-cost ». L’une des plus connue est la formule « révolution obsèques » qui promettait des funérailles pour 789 euros. Une formule qui, à l’arrivée, n’incluait pas toutes les prestations comme l’ouverture de la sépulture ou même l’inhumation et la crémation. À l’arrivée, les quelques clients y ayant souscrit ont payé un montant compris entre 1 498 et 5 105 euros.

Pour pallier ces déconvenues, les pouvoirs publics commencent à s’emparer du dossier en rappelant leurs obligations aux agents de pompes funèbres comme notamment leur devoir de remettre un devis conforme à leurs clients comprenant une maquette préconçue, les tarifs de l’ensemble des prestations et options choisies, etc. Une obligation qui dans 60% des cas n’était pas respectée.

Labels, coopératives et pratiques écologiques, les nouveautés qui devraient révolutionner le marché des pompes funèbres

Cette situation a également permis d’encourager certains acteurs à se différencier en intégrant de nouveaux labels et de nouvelles pratiques plus écologiques. De même, des coopératives funéraires ont fait leur apparition en France sur le modèle québécois.

Le premier label RSE du secteur funéraire, le Label-F, a été présenté le 18 novembre 2021 au salon funéraire de Paris. Ce label vise à lutter contre la concurrence des grands groupes funéraires, à valoriser les acteurs vertueux et à sécuriser les familles concernant les pratiques de l’entreprise.

En parallèle, la tendance des funérailles écologiques émerge. De nouveaux modèles de funérailles sont désormais proposés afin de réduire l’impact environnemental des obsèques sur la planète. Il existe, par exemple, diverses solutions comme :

  • L’usage de cercueil en carton : Des cercueils composés de fibres recyclées et de fibres de papier vierge qui sont plus écologiques et plus économiques puisqu’ils coûtent entre 300 et 1 100 euros en moyenne.
  • L’humusation : Il s’agit d’une pratique consistant à transformer le corps du défunt dans un compost de broyats de bois d’élagage. En 1 an, le corps est décomposé et transformé en 1,5 m3 d’humus fertile. Un mélange pouvant fertiliser environ 100 arbres.
  • La liquéfaction : Cette pratique consiste à dissoudre le corps du défunt dans une solution chimique à base d’eau et d’alcali (un sel dérivé d’un métal alcalin) chauffée à 180 degrés. La liquéfaction permet d’émettre un tiers de gaz à effet de serre de moins que la crémation.

Enfin, des acteurs nouveaux combinent écologie et transparence, il s’agit des coopératives funéraires. Fondée sur la solidarité et le souci de l’intérêt général, les coopératives cherchent avant tout la satisfaction des besoins de ses clients en devenant des « accompagnateurs » et non plus des « vendeurs de cercueils ».

La Coopérative de Pompes Funèbres Nantes Orvault est la première à avoir vu je jour en France. Cette nouvelle structure offre de nombreux avantages aux familles des défunts puisqu’elle fait preuve d’une réelle transparence tarifaire auprès de leurs clients, elles proposent également des prix justes et une prestation d’accompagnement souvent très complète. Les coopératives funéraires offrent des funérailles dignes et respectueuses tout en restant innovantes puisqu’elles proposent des alternatives écologiques comme l’usage de cercueil en carton notamment.

Ces nouvelles pratiques représentent certainement l’avenir des pompes funèbres, notamment pour ceux qui recherchent des obsèques plus transparentes et plus responsables. En effet, si la libéralisation en 1993 a permis de développer le nombre de structures funéraires, force est de constater que le secteur s’est recroquevillé autour d’acteurs puissants. Ainsi, le marché n’a pas bénéficié de prix suffisamment justes. Le jeu de la concurrence doit, par le biais de coopératives, replacer l’humain au centre des pratiques dans une filière qui avait peut-être oublié que vendre des cercueils n’est pas une fin en soi.

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